Sensibilisation – Le nucléaire et l’accès à l’information

Noémie MARTIN

Fukushima : un accident, qui en France, a alimenté la culture du risque nucléaire…

Un sujet controversé et militant : le nucléaire divise la société. Alors comment trouver les réponses à nos questions ?

Source : Revue générale nucléaire, dossier « panorama mondial du nucléaire », 2016, SFEN

Selon les chiffres de l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique), en 2015 le parc nucléaire mondial compte 437 réacteurs nucléaires en fonctionnement, répartis dans 30 pays (Connaissance des énergies). La France à elle seule concentre 58 réacteurs nucléaires.

Three Mile Island, Tchernobyl et Fukushima sont trois grandes catastrophes nucléaires qui alimentent un débat d’idées et d’opinions. L’accident de Fukushima a suscité des débats sur la place de l’atome dans certains pays. Ainsi, l’Allemagne mène une politique pour « sortir du nucléaire ».

L’enjeu de cet article est de montrer qu’à travers l’exemple d’une catastrophe, ici Fukushima, l’opinion publique peut changer du tout au tout. Il s’agira de montrer que les français ne sont pas restés indifférents et qu’ils peuvent à leur échelle de citoyen obtenir des informations et participer en tant qu’acteurs locaux à des débats de concertation autour du nucléaire. L’objectif sera de présenter la situation de Fukushima aujourd’hui et de faire le lien avec les décisions et actions qui ont été mené en France, pour qu’un tel scénario ne puisse se reproduire

Fukushima…

Plus d’un demi-siècle après les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki, le Japon est une nouvelle fois touché par la question du nucléaire. Le 11 mars 2011, le pays doit faire face à un tsunami et à la tragédie de la centrale de Fukushima. Ce séisme de magnitude 9 sur l’échelle de Richter provoque un tsunami sur toute la côte Est du Japon. Une catastrophe qui s’est accentuée par l’inondation des systèmes de refroidissement qui a conduit à la perte de contrôle humain de 3 réacteurs de la centrale.  Ainsi, Fukushima est identifiée comme un accident majeur de niveau 7 sur l’échelle INES (une échelle de référence qui permet de classer les niveaux d’accident en fonction des conséquences sur le site et les conséquences à l’extérieur du site ; allant du niveau O à 7).

 Après un bilan humain et environnemental très lourd, la Japon doit apprendre à se reconstruire et à engager des mesures pour organiser une situation post-accidentelle nucléaire. A l’inverse de l’Ukraine (accident de Tchernobyl 1986), le Japon fait le choix de reconquérir les territoires contaminés. Le pays entreprend alors de réinvestir des territoires évacués et entame des actions de décontaminations. Or, d’après les chiffres de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), à ce jour seuls 900 des 80.000 personnes évacuées sont rentrées chez elles. Les autorités ne peuvent à ce jour solutionner les conséquences de ce drame et la population doit faire face à une situation post-accidentelle à comprendre et à organiser : aujourd’hui, demain et les jours qui suivront. Face à un scénario d’une telle ampleur, nous ne sommes qu’être humain et ne pouvons pas, à l’échelle temporelle d’une vie, résorber cette catastrophe.

Source : SudOuest, 2013

Il est aujourd’hui important de garder en mémoire Fukushima, comme une catastrophe qui ne doit pas se reproduire. Le monde doit apprendre de ses erreurs mais de manière constructive. Certains mentionneront plus tard, qu’il s’agissait « d’une création du mythe de la sûreté nucléaire, des risques réels qui ont été négligés et de ceux qui n’ont pas été rendus publics » (Comité de Publication du Recueil de Fukushima, 2015, p.69). Prendre conscience des risques c’est avant tout en avoir connaissance. Et pour cause, les leçons tirées de Fukushima, en France, ont conduit à renforcer la prévention des accidents pour anticiper des crises de niveaux extrêmes dépassant ceux du niveau en vigueur (IRSN, 2016).

Il est important de se mettre dans la disposition d’esprit qu’il faut engager des actions et approfondir le dialogue. Malgré les précautions prises, un accident reste possible et nul ne peut garantir qu’il n’aura jamais lieu car l’improbable doit et de devra toujours être envisageable.

Alors comment en France, peut-on trouver des réponses à nos questions et à qui devons-nous, nous adresser ?

En France, depuis 2006, suite à la loi relative à la Transparence et à la Sûreté en matière Nucléaire (loi TSN- décret 2008) toutes les installations doivent disposer d’une Commission Locale d’Information (CLI). Les CLI sont composées de quatre collèges :  d’élus (50%), d’associations, de personnes qualifiées, de syndicats et tous sont bénévoles. Elles ont un rôle important dans la sphère du nucléaire car elles peuvent poser des questions, organiser des débats, engager des expertises, faire des analyses et participer à des visites de sites. Autant d’investigations qui permettent de relayer les préoccupations des riverains sur des sujets qui concernent le nucléaire civil (centre nucléaire de production d’électricité, site d’entreposage des déchets radioactifs …). Chercher des réponses à ces questions et intervenir dans le débat du nucléaire ne doit cependant pas être assimilé à la volonté de faire entendre sa voix et ses opinions. La participation doit avant tout répondre à un objectif commun. De ce fait, qu’on soit élu, syndicaliste, défenseur de l’environnement, ingénieur, les CLI disposent d’une parole qui est plurielle mais avec une ambition commune : la sûreté et la sécurité des installations nucléaires. Et c’est dans ce contexte que les CLI ont un rôle primordial et sont les interlocuteurs de la société civile.

Des études effectuées par l’IRSN ont montré que l’accident de Fukushima a influencé la perception du risque nucléaire des français, des peurs qui se sont estompées au fil des mois qui ont suivi l’accident mais qui ressurgit lors des dates anniversaires.

Lorsqu’on regarde le cas du Japon avec le groupe financier de TEPCO (Tokyo Electric Power Company) ont se rend compte que la confiance a laissé la mainmise sur l’appropriation de toutes les richesses du territoire (pêche…). Les compagnies d’électricité ont réussi sans que l’on s’en aperçoive à instaurer un climat de confiance. Bien avant l’accident de Fukushima, il y a 10 ou 20 ans, les compagnies d’électricité ont acquis au Japon, un statut particulier différent des autres entreprises du secteur privé.

Ainsi, elles avaient la forme d’entreprises privées mais qui allaient bien au-delà. En effet, elles avaient le pouvoir, de décider arbitrairement que le prix de l’électricité devait être fixé en fonction des marges bénéficiaires souhaité. Cet exemple marque le conflit permanent des financiers qui prennent le pouvoir sur les industries, sachant que dans ce cas il ne s’agit pas d’une simple industrie mais bien celle du nucléaire.  Mais le 11 mars 2011 marque la fin de cette prospérité laissant place à un désastre humain et environnemental. Le monde entier s’est tourné vers Fukushima, des images de fléau qui laissent place à une prise de conscience internationale.

Faire connaître le rôle des CLI, c’est avant tout vous sensibiliser qu’un accident peut se produire, et ce n’est qu’ensemble, qu’on peut maintenir une certaine pression sur les installations nucléaire et sur la mainmise des financiers. C’est en nous intéressant et en nous posant des questions que nous pourrons maintenir la sûreté et la sécurité des installations nucléaire. La rentabilité financière ne doit pas outrepasser sur la sécurité et sûreté des installations ; la solution première face aux problèmes.

Et notre rôle est là, restons sur nos gardes et intéressons-nous à ce qui passe !

Qu’est-ce qu’une CLI ? Pour plus d’informations voici une petite vidéo réalisée par l’Association Nationale des Comités et Commissions d’Information (ANCCLI) :

Sources :

Pelletier, P., 2012, L’ère post-Fukushima, Carto le monde en carte, N°10, mars-avril, p.10 à 21

Comité de Publication du Recueil de Fukushima, 2015, Fukushima 10 leçons pour protéger la population des catastrophes nucléaires, dossier PDF à la CLIN

Lafon, C., (2013) Fukushima : 44 milliards d’euros, le coût exorbitant de la décontamination, 2013, SudOuest  http://maplanete.blogs.sudouest.fr/archive/2013/07/24/fukushima-44-milliards-d-euros-le-cout-exhorbitant-de-la-dec.html

IRSN, 2013, L’analyse de l’IRSN du déroulement de l’accident de Fukushima, vidéo, accessible                        https://www.youtube.com/watch?v=tjEHCGUx9JQ

IRSN, 2016, Dossier Fukushima http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-accidents-nucleaires/accident-fukushima-2011/fukushima-2016/Pages/0-fukushima-daiichi-en-2016-sommaire.aspx#.WicIk0ribIV

Revue générale nucléaire, dossier, 2016, Panorama mondial du nucléaire, SFEN  http://www.sfen.org/fr/rgn/111-de-la-difficulte-dimaginer-le-monde-de-demain

Connaissance des énergies (2015) Parc nucléaire mondial (production d’électricité) https://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/parc-nucleaire-mondial-production-d-electricite

http://www.sfen.org/sites/default/files/public/atoms/files/fukushima_2017_-_sfen.pdf

http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-accidents-nucleaires/accident-fukushima-2011/fukushima-2016/Pages/7_lecon-France-fukushima-2016.aspx#.WiWkPUribIU