Sciences participatives et environnement

ARTICLE : Contribution des sciences participatives pour récolter des données sur la trame verte et bleue

Par Loé Desvignes


Qu’est-ce que les sciences participatives? 

Selon François Houiller, les sciences participatives «sont des formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non scientifiques-professionnels participent de façon active et délibérée » (Francois Houiller, 2017). Les sciences participatives ou sciences citoyennes placent les individus au cœur des recherches scientifiques. Ce sont des projets qui proposent aux citoyens de devenir producteur ou collecteur de données. (IFREE, 2010)

Un des premiers projets de sciences participatives s’est déroulé en Amérique du Nord, dans les années 1900. La Fondation Audubon a mis en place le « chrismas bird count »:durant deux semaines des citoyens ont compté les oiseaux. Ce suivi des oiseaux est devenu une référence dans le domaine des sciences participatives et cette association compte aujourd’hui plus de 50 000 citoyens mobilisés.

Illustration 1: Christmas Bird Count told par Chan Robbins, 20eme siècle 

Illustration  2: Camilla Cerea/ Audubon, 21eme siècle

Les évolutions techniques et technologiques donnent la possibilité de créer de nouvelles bases de données avec l’aide des habitants. Désormais de nombreuses personnes peuvent être impliquées dans la « production de connaissance pour l’aménagement du territoire » (Amelot et al, 2017). La hiérarchisation des données évolue et les bases de données collaboratives sont démocratisées. Il est possible de penser une ouverture, une certaine connivence entre les différentes bases de données «plutôt qu’une opposition entre des bases officielles et des bases citoyennes» (Amelot et al, 2007). En effet, les différents types de données tendent à se compléter et ne rentrent plus dans un rapport d’opposition.

La pertinence des données collaboratives est souvent placée sur la même échelle de valeur que celle des données institutionnelles. De nombreux projets de collecte de données ont prouvé la validité des informations récoltées. L’IFREE a réalisé un livret qui inventorie toutes les initiatives des sciences participatives (livret IFREE). Ainsi, les sciences participatives sont en train de se populariser. En effet, la question de la création et de la valeur des données engendre une réflexion sur la façon dont nous souhaitons représenter le monde qui nous entoure. En ce sens, utiliser des données collaboratives permet de partager des connaissances faisant partie de notre «conscience collective». Autrement dit, on pourrait penser que les données collaboratives dévoilent une nouvelle valeur sociale.

Qu’est-ce que la Trame Verte et Bleue?

La fragmentation et la destruction des habitats naturels sont responsables de l’érosion de la biodiversité ( Amasllem, Deshayes, Bonnevialle, 2010). Ces dynamiques entravent la circulation et les échanges de la faune et de la flore. Afin de compenser les effets négatifs de la fragmentation des habitats naturels, les biologistes ont conseillé d’accroître la connectivité entre les habitats afin de maintenir, et si possible d’améliorer, la viabilité de la population de différentes espèces répertoriées (Bennett, 2003). La Trame Verte et Bleue est un réseau de continuités écologiques, terrestres et aquatiques, tentant de protéger les espaces de vie de la faune et de la flore. Ces espaces sont identifiés par les schémas régionaux de cohérence écologique, qui aide les collectivités à planifier l’aménagement de leur territoire. (centre de ressource Trame Verte et Bleue). Les trames mettent en avant les espaces riches en biodiversité, ce qui permet de les protéger en les intégrant dans des plans d’aménagement adaptés à la spécificité de l’espace. 

Sur le territoire français de nombreux réservoirs de biodiversité ont été identifié, il s’agit d’espaces contenant une faune et une flore abondante. Ces réservoirs écologiques forment des espaces linéaires ou discontinus dans le paysage. Le schéma de la trame verte et bleue prend alors en compte ces corridors écologiques. De façon plus générale, les corridors remplissent plusieurs rôles : habitat, conduit ou couloir. Parmi les éléments du paysage jouant le rôle de corridors, on peut citer les ripisylves, les réseaux de haies, les lisières forestières, les bandes enherbées, les routes et autres voies de communication artificielles créées par l’homme. (Laurent Bergès, 2010)  

Illustration 3: Schéma de la trame verte et bleue, SRCE Basse-Normandie, 2010

La notion de continuité écologique apparaît à partir des années 1990 dans les politiques internationales de protection de la nature. En France il faut attendre le Grenelle de l’Environnement de 2009 pour que la Trame Verte et Bleue entre dans le champ juridique. Aujourd’hui les Trames Vertes et Bleues sont des informations indispensables pour aménager les territoires.

Sciences participatives et Trame Verte et Bleue 

Re-connaître la nature et la biodiversité constitue un enjeu essentiel de nos sociétés. Les sciences participatives sont utilisées dans de nombreux domaines de recherche. Les sciences naturalistes par exemple, qui sont des sciences de terrain, ont régulièrement recours aux sciences participatives. En effet, pour réaliser des projets sur le terrain, cette méthode peu coûteuse permet de récolter des données afin de contribuer à des inventaires ou des expériences. (IFREE, 2010) 

Ainsi les projets de recensement participatifs semblent pouvoir jouer un rôle fondamental pour la création de nouvelles données sur la biodiversité. Ces inventaires sont régulièrement réalisés de manière collective. Ces méthodes rendent possible la collecte d’informations précieuses auxquelles les chercheurs n’ont parfois pas accès.

Bibliographie:

-Amelot Xavier, Laurent Couderchet, Matthieu Noucher, 2017, Données institutionnelles et données contributives sur la biodiversité, quelle légitimité  ?,  Mappe Monde

-Amsallem, Deshayes, Bonnevialle, 2010, Analyse comparative de méthodes d’élaboration de Trames vertes et bleues nationales et régionales, Sciences Eaux et Territoires, n°3, pp 40-45

-Bennett, A.F., 2003, Linkages in the landscape. The role of corridors and connectivity in wildlife conservation, Gland, Switzerland et Cambridge, UK, IUCN, pp 254

-Bergès Laurent, 2010, Corridors écologiques et conservation de la biodiversité, intérêts et limites pour la mise en place de la Trame verte et bleue, Science Eaux et Territoires, numéro 3, pp 162

-Houiller François, Pierre-Benoît Joly et Jean-Baptiqte Merilhou-Goudard, 2017, Des recherches participatives dans la production des savoir liés à l’environnement-Les sciences participatives: une dynamique à conforter, Natures Sciences Sociétés 25, pp418-423

-IFREE, Sciences participatives et biodiversité, les livrets de l’Ifrée n°2