Les Zones à Faibles Emissions mobilités

Source: Les Zones à Faibles Emissions mobilités – Environnement-Mobilité (wordpress.com)

Par Mouhamadou NAING – Janvier 2023

Définition

Les Zones à Faibles Emissions (ZFE) sont des territoires où la circulation des véhicules les plus polluants est restreinte voire interdite. L’objectif de leur création est de réduire la pollution atmosphérique dans les villes qui reste un enjeu de sanitaire majeur. Selon une étude réalisée par santé publique France, l’impact de la pollution de l’air dû aux particules fines provoque près de 48 000 décès prématurés par an, soit 9% de la mortalité en France.

Pourquoi des ZFE?

Face aux mesures insuffisantes prises par l’Etat en vue d’améliorer la qualité de l’air, beaucoup d’associations ont saisi les juridictions administratives pour obtenir la condamnation de l’Etat pour non-respect à une directive européenne du 28 mai 2008 qui fixe les valeurs limites de concentration de particules fines (PM10) et de dioxyde d’azote (NO2).
Ainsi, la France est condamnée par le Conseil d’Etat a versé 10 millions d’euros d’astreinte par semestre pour non-respect des normes sur la qualité de l’air.
Pour pallier ces insuffisances, l’Etat a été appelé à réviser ces Plans de Prévention de l’Atmosphère (PPA), introduits par la Loi sur l’Air et l’Utilisation Rationnelle de l’Energie (LAURE en 1996).  Mis en œuvre avec les collectivités et les acteurs locaux, ces PPA visent à préserver la qualité de l’air sur le territoire. Dans cette perspective de lutte contre la pollution atmosphérique, la loi d’Orientation sur les Mobilités (LOM) et la loi Climat et résilience instituent la création de ZFE dans les agglomérations et les zones où un plan de protection de l’atmosphère est adopté.
Ces ZFE sont considérées comme des leviers pouvant contribuer à la décarbonation des transports, secteur clé pour la transition écologique.
A travers cet article, nous essaierons de voir les enjeux sociaux et environnementaux que peut avoir la généralisation des ZFE dans les villes.
Pour cela, nous verrons dans un premier temps le cadre juridique et réglementaire ayant trait à l’instauration des ZFE puis, dans un second temps, nous analyserons les enjeux socio-environnementaux qui peuvent découler de leur mise en place.

Cadre juridique de création des ZFE

On commence à s’intéresser aux ZFE en France à partir de 2015 dans le cadre de la Loi sur la Transition Energétique pour la Croissance Verte en 2015. Selon l’ADEME (2018), les ZFE font écho aux au dispositif LEZ (Low Emission Zone) mis en œuvre dans plusieurs villes de l’Union Européenne pour réduire les particules (PM) et/ou les oxydes d’azote (NOX).
Dans un premier temps, la loi TECV a instauré le dispositif de ZCR (Zones à Circulation Restreinte) pour doter les collectivités territoriales d’un outil afin de lutter contre la pollution atmosphérique. 
Par la suite, il y a eu la Loi d’Orientation sur les Mobilités de 2019 qui rend obligatoire l’instauration d’une zone à faibles émissions mobilité – ZFE-m qui remplace désormais les ZCR. Une obligation qui concerne les collectivités locales qui dépassent les normes de la qualité de l’air définies par l’article L. 221-1 du Code de l’Environnement. Puis, la loi climat et résilience de 2021 qui impose aux agglomérations de plus de 150 000 habitants la création d’une ZFE -m au plus tard le 31 décembre 2024.

Cadre juridique d’instauration DES ZFE

Ainsi, d’ici 2025, une quarantaine de villes seront concernées par la création de ZFE. Ce qui est déjà le cas depuis depuis 2021 pour une dizaine de métropoles où les seuils d’oxydes d’azote et de particules fines dépassent les normes fixées par l’Union Européenne.

Villes concernées par la création de ZFE. Source : Réseau action climat

Processus de mise en œuvre d’une ZFE-m

Pour qui est de la mise en place des ZFE sur un territoire, les autorités locales en l’occurrence le Président de l’Intercommunalité ou le maire sont désignés comme autorité pouvant organiser ces zones d’après l’article L. 5211-9-2 1 du Code Général des Collectivités Territoriales.

A ce titre, il fixe par arrêté :

  • Le périmètre géographique de la ZFE sur son territoire ;
  • Les catégories de véhicules pouvant y circuler ;
  • La périodicité d’application : les horaires et jours ;
  • Les dérogations octroyées ;
  • Les modalités de contrôle.

Ci-dessous un schéma résumant les différentes étapes à franchir pour la mise en œuvre d’une ZFE-m

Les étapes de mise en oeuvre d’une ZFE. Mouhamadou NIANG

Pour distinguer les véhicules qui doivent rouler dans une ZFE, la collectivité s’appuie sur la classification des Certificats Qualité de l’Air. Selon le ministère de la Transition écologique, « le certificat qualité de l’air Crit’Air est une vignette sécurisée, à coller sur le pare-brise du véhicule ». Il existe six classes de Certificats qualité de l’air aussi appelées classes environnementales. Elles sont numérotées de 0 à 6 avec des pastilles à couleurs différentes

Vignettes Crit’Air. Mouhamadou NIANG

Exemple de mise place d’une ZFE: Cas de la Métropole de Grenoble

Grenoble fait partie des premières villes concernées par la mise en place de ZFE. Ainsi, dés 2019, elle instaure une ZFE concernant les véhicules utilitaires légers et les poids lourds de Crit’Air 5 sur 10 Communes de l’agglomération situées hors voies rapides urbaines. Progressivement, le périmètre est élargi à 17 Communes supplémentaires, soit 27 au total 27 Communes.
L’objectif fixé par cette métropole est que, d’ici 2025, seuls les véhicules classés Crit’Air 1 puissent circuler dans ce périmètre. Cela devrait amener à diminuer les émissions de particules fines de 46% et de 69% l’oxyde d’azote.
A l’image de toutes les ZFE, en cas de non respect, c’est une amende de 68 € qui s’applique pour les véhicules interdits de rouler dans la ZFE.

Périmètre ZFE Grenoble. Source : www.grenoble.fr

Impacts socio-environnementaux de la mise en œuvre des ZFE

Les ZFE contribuent sensiblement à l’amélioration de la qualité de l’air grâce à la diminution des véhicules les plus polluants. Selon une étude de l’ADEME (2022), elles permettraient de réduire significativement les concentrations de dioxyde d’azote et de particules fines PM10 (jusqu’à 12%) et de particules PM2.5 (jusqu’à 15%).
Aussi, elles favorisent le rabattement sur les modes de transport alternatifs à la voiture individuelle comme les transports en commun, les modes actifs (vélo) et les modes partagés (autopartage, covoiturage…).
Toutefois, il faut souligner qu’à côté de ces enjeux environnementaux, la mise en place de ZFE peut entraîner des conséquences sociales négatives pour une bonne partie des automobilistes. En effet, les usagers modestes vivant en milieux périurbains et ruraux qui n’ont pas d’autres alternatives à l’usage de la voiture particulière seront contraints dans leur mobilité quotidienne. C’est aussi valable pour tous ceux qui ne pourront pas renouveler leur véhicule faute de moyen financier.
La question qui se pose c’est comment pallier ces inconvénients. Autrement dit, quelles mesures faudrait-il mettre en place pour que la ZFE ne soit pas un outil d’exclusion sociale au sein des grandes villes ?
A notre avis, pour favoriser le développement des ZFE dans les villes, il est important de miser sur les transports en commun qui peuvent offrir une alternative pour les personnes qui n’ont pas les moyens pour changer leur véhicule diésel.
Ensuite, un des leviers essentiels pour rendre les ZFE plus accessibles socialement, ce sont les mobilités durables notamment le vélo et l’autopartage.  En effet, une politique ambitieuse d’aide à l’achat ou de location de vélo à prix attractifs permettrait aux ménages d’utiliser moins en moins leur voiture pour les déplacements courte distance.
De même l’autopartage est une alternative à l’achat d’un véhicule mais aussi une solution pour se déplacer dans une ZFE en louant une voiture électrique.

Conclusion

En définitive, les Zones à Faibles Emission ont vu le jour en France et en Europe pour réduire la pollution atmosphérique dans les villes. Leur mise en place répond à un enjeu de santé publique et de transition écologique. Néanmoins, comme nous l’avons souligné plus haut, leur application risque d’engendrer des conséquences majeures sur la mobilité des personnes modestes qui n’ont pas les moyens pour changer leur véhicule diésel. C’est la raison pour laquelle, nous pensons que le développement des mobilités douces comme le vélo ou l’autopartage ou bien même favoriser plus de télétravail pour les employés pourraient être des alternatives pour lutter contre l’injustice sociale et l’exclusion des plus pauvres.

Références

Cossardeaux, J. (2022). Pollution : Vingt mesures pour faire accepter les zones à faibles émissions. Echos (Paris, France), p. Echos (Paris, France). Consulté le 15 janvier 2023.

Guimard, E. (2023). Les zones à faibles émissions bousculent la logistique du dernier kilomètre. Echos (Paris, France), p. Echos (Paris, France). Consulté le 12 janvier 2023

Mouly, B. (2022). Les métropoles déploient progressivement leurs zones à faibles émissions. Echos (Paris, France), p. Echos (Paris, France). Consulté le 26 décembre 2022.

ZFE-m: Quelles sont les villes ZFE (zones à faibles émissions mobilité) ? Consulté le 2 janvier 2023.(lelynx.fr)

Tout comprendre – ZFE: ces millions de voitures bientôt (ou déjà) interdites de circuler dans les grandes villes. Consulté le 3 janvier 2023. bfmtv.com › auto › tout-comprendre-zfe-ces-millions-de-

La Zone à Faibles Emissions (ZFE) de la Métropole grenobloise. Consulté le 3 janvier 2023. grenoble.fr › 1072-zone-a-faibles-emissions.htm

Zones à faibles émissions : pour mieux respirer en ville. Publié le 13 janvier 2021. Consulté le 15 janvier 2023. gouvernement.fr › zones-a-faibles-emissions-